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lundi 5 avril 2010

Merci Julie Charpentrat pour cette dépêche AFP parue mardi 30 mars 2010

Des ateliers beauté pour femmes au chômage : "la frivolité utile"
Par Julie CHARPENTRAT
PARIS, 30 mars 2010 (AFP) - Catherine Moysson, 56 ans, est rayonnante. Elle vient de passer entre les mains expertes de Lucia Iraci, coiffeuse de renom, qui, une fois par mois, reçoit gratuitement des femmes en difficulté, dans son salon niché au coeur d'un quartier chic de Paris. "Je trouve mes cheveux moches", disait Catherine quelques minutes plus tôt, l'air un peu triste. "Non, ils sont fins, c'est tout", lui avait répondu, concentrée, Lucia Iraci avant de s'affairer, ciseaux et peigne en main. "Pour les entretiens d'embauche, la queue de cheval, on oublie, vous laissez les cheveux sur les épaules", lui conseille aussi Lucia, frêle cinquantenaire aux boucles blond vénitien, qui coiffe habituellement ses clientes pour près de 150 euros dans le VIe arrondissement. C'est le concept des "ateliers beauté" du lundi : redonner confiance en elles à des femmes qui ont souvent renoncé à se faire belles quand elles ont perdu leur emploi. Lucia espère aussi cette année lancer un "salon social", où les femmes pourront venir se faire "relooker" de la tête aux pieds pour une somme symbolique. "Quand on perd son travail, on perd son identité, on a tendance à se laisser aller, à traîner en jogging devant la télé", confirme Catherine, ancienne assistante personnelle d'une "personne célèbre" et qui cherche un emploi depuis huit mois. Et quand on passe un entretien d'embauche, "on vend son aspect extérieur avant même ses capacités professionnelles. C'est le premier passeport", témoigne Sonia, 49 ans, en attendant son tour. "Certaines femmes sont cassées par la vie. Ces ateliers doivent leur redonner de la force, une confiance en elles qui passe aussi par l'apparence", explique Véronique Morali, présidente de "Force femmes", une association qui aide les femmes de plus de 45 ans et les envoie régulièrement chez Lucia Iraci. Plus souvent touchées par l'emploi précaire, le temps partiel et même la pauvreté, les femmes sont aussi en moyenne 27% moins bien payées que les hommes et leur taux de chômage est plus élevé. Après 45 ans, elles ont encore plus de mal à retrouver un emploi. Chercher du travail, "c'est aussi une affaire de séduction, même inconsciente. Quand on est en entretien d'embauche, on séduit. Mais si on se présente avec le cheveux gras et des racines de 5 cm, avec un air triste, on transmet un mal-être, un manque d'assurance", dit encore Mme Iraci. Pour elle, l'atelier beauté, "c'est de la frivolité utile". Ces "codes de l'apparence", Elisabeth, 48 ans, en a fait les frais. Envoyée par une agence d'intérim pour un poste d'assistante de direction d'une grande entreprise, on lui conseille de s'habiller avec grand soin. "Mais j'en avais fait trop. Dans la salle d'attente, je voyais passer les employées, toutes habillées en noir alors que j'avais choisi de mettre de la couleur. Je me sentais décalée", raconte-t-elle. Véronique, 47 ans, ne veut pas dire depuis combien de temps elle cherche un emploi. Elle écoute, amusée, les conseils de la maquilleuse Fabienne Antoniewski, qui lui explique qu'avec des astuces simples, on peut parfaitement se maquiller avec des produits "premiers prix, dans la grande distribution". A quelques mètres de là, Catherine, tout sourire, n'en revient pas : "je suis rentrée avec une tête de cocker, je ressors avec une tête de star".

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